Le droit pour les avocats de communiquer et de visiter leurs clients détenus est une liberté fondamentale au sens du référé-liberté
Conseil d’État,14 juin 2024, n° 477671
Par une décision du 14 juin 2024 (n°477671), le Conseil d’État (Ci-après « CE ») considère que le droit pour l’avocat de communiquer librement avec ses clients détenus et de leur rendre visite ne peut, a priori, faire l’objet d’une quelconque limitation. Ce droit représente une liberté fondamentale au sens du référé-liberté.
Il vient s’ajouter à la liste des libertés fondamentales reconnues par le Conseil d’État depuis la création de cette procédure d’urgence par la loi du 30 juin 2000. Le juge des référés peut en effet ordonner à l’administration de prendre toute mesure pour faire cesser une atteinte à une liberté fondamentale, à condition de tenir compte de l’urgence de la situation et de la possibilité d’ordonner des actions utiles pouvant être immédiatement mises en œuvre.
En l’espèce, le requérant est incarcéré depuis novembre 2021 au sein de plusieurs établissements pénitentiaires successifs. Par l’ordonnance du 5 juillet 2023, il s’est vu refuser par le juge des référés, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative (CJA), sa demande d'enjoindre au directeur du centre pénitentiaire de délivrer à son avocat un permis de visite, au motif que la condition d’urgence n’avait pas été remplie. Le requérant se pourvoit donc en cassation.
Le CE observe tout d’abord que les détenus disposent du droit de communiquer librement avec leurs avocats. Tenant compte du rôle que remplit l’avocat vis-à-vis des intéressés, ce droit doit pouvoir être exercé selon une fréquence qui a priori ne peut être limitée. En effet, la faculté d'assurer effectivement sa défense devant le juge implique le droit pour les avocats de communiquer librement avec leurs clients et de leur rendre visite. Le Conseil d’État en conclut que ce droit représente une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du CJA.
En conséquence, toute atteinte grave et manifestement illégale du fait de l'action ou de la carence de l'autorité publique justifie qu’une personne, au regard de sa situation personnelle, puisse saisir le juge des référés. Il revient alors au requérant de démontrer les circonstances particulières demandant qu’il bénéficie de « mesures de sauvegarde nécessaires », en réponse aux conditions d'urgence particulière prévues par l'article L. 521-2 susmentionné.
En l'espèce toutefois, la condition d’urgence n’est pas être remplie, le Conseil d’État notant qu’à la date de l’introduction de la demande, le requérant avait quitté l’établissement litigieux et que par la suite, il n’avait pas rencontré de nouvelles difficultés pour communiquer avec son avocat.
M2 DEDH